Textes de Denis Maugenest

Allocution sur la crise ivoirienne pour le FASV (18 juin 2011, Ambassade de Côte d’Ivoire en France)

Excellence Monsieur l’ambassadeur, Mesdames et Messieurs, chers Amis du Fonds Saint Viateur,

Je ne crois pas être le mieux placé pour parler de la longue crise que traverse la Côte d’Ivoire en général, tous ici en avez sans doute une expérience plus ancienne que la mienne, par nationalité pour les uns, par coopération ancienne pour les autres. Pour ce qui est de moi, après un premier passage relativement bref mais instructif en 1975 et quelques autres après, je n’y ai été un peu plus continûment que depuis octobre 2002, mais j’y aurai été à plein temps ces neuf années – à la vérité particulièrement délicates – de l’histoire ivoirienne : depuis la division du pays fin septembre 2002 jusqu’à l’effondrement, en avril dernier et dans des conditions effroyables, du régime qui s’était mis en place fin 2000 dans des conditions calamiteuses.

Si Pierre Frégeac m’a demandé d’en dire quelques mots, c’est peut-être à la suite des informations que j’ai pu envoyer quotidiennement depuis le 1er décembre à plusieurs Amis comme lui, assurant comme je le pouvais et le sentais le suivi d’une situation qui, dramatiquement enclenchée à la suite du scrutin du 28 novembre, allait entraîner l’effroyable tragédie que nous avons vécue sur place. Le mot, EFFROYABLE, signifie dans mon esprit ce qu’il veut dire étymologiquement : « qui remplit d’effroi et de terreur » ceux, certainement, qui vivent les événements ; ceux, peut-être, et plus ou moins, qui les observent à quelque distance ; ceux, sûrement je crois, qui s’efforcent d’en faire des analyses et d’en interpréter le sens, la signification…

Je ne veux pas prétendre ici à quelque synthèse que ce soit de cette tranche d’histoire telle que notre ami Pierre m’a proposé de le faire : douze ans de crise, quatre mois de guerre – bilan et perspectives. Un bilan ne peut être établi qu’à la fin d’un exercice, et nous voyons bien que l’exercice de ces dix dernières années n’est pas clos, que ses prolongations sous diverses formes malheureuses grèvent sérieusement le démarrage de l’exercice suivant : celui de la reconstruction de la Côte d’Ivoire, celui, dirais-je pour ma part, de la construction d’une Nouvelle Côte d’Ivoire, pour reprendre une expression employée par le Président Ouattara.

Je me contenterai de vous faire part, plus modestement, des impressions qui sont les miennes dans le moment présent, de ce qu’il me paraît possible de déchiffrer de « ce qui s’est passé » et qui a tout de même grandement « étonné » les Ivoiriens eux-mêmes qui en reviennent difficilement, stupéfaits d’avoir été si loin, ‘trop loin’ (comme l’a dit Paul N’Dré) dans un pays qui passait pour un pays de fraternité et de paix… et qui a étonné tous ses amis qui s’étaient habitués à le considérer comme le lieu d’une sorte de miracle – y compris, croyaient-ils ou voulaient-ils croire encore fin novembre, du passage réussi à une authentique démocratie par un scrutin indiscutable… J’avoue avoir été moi-même de ceux qui ont voulu croire, quelque temps (jusqu’au 18 décembre), à ce dernier miracle, avec, me semble-t-il, l’ambassadeur de France, le président Ouattara… probablement pas le premier Ministre Guillaume Soro… !

Je parlais d’EFFROI ? Le dictionnaire Robert en donne la définition suivante : grande frayeur, souvent mêlée d’horreur, qui glace, qui saisit… affolement, crainte, épouvante, horreur, peur et terreur… Cet effroi est bien sûr celui qu’ont connu et vécu les habitants d’Abobo et de Yopougon, après deux de Douékoué et de bien d’autres lieux de l’ouest  notamment… Il laisse l’impression de cauchemar, de rêve pénible et durable, d’obsession et de tourment… Ce sentiment d’effroi est-il déjà passé ? Doit-il passer ? Je ne le crois pas, et il ne serait sans doute ni juste ni bon qu’il passe trop vite, car dans ce sentiment d’effroi, ce sont aussi bien des vérités qui se révèlent et qui pourront constituer demain – et dès aujourd’hui, le plus tôt possible – le socle authentiquement durable de la société à reconstruire et, plus radicalement encore, à fonder, édifier et élever sur de nouvelles bases.

1) Le vécu d’événements réellement effroyables… In cauda venenum !

C’est la phase terminale de cette longue crise qui révèle en réalité le plus clairement tout ce qui faisait la vitalité clair-obscur, séduisante pour les uns, malfaisante pour les autres, du « régime » à l’œuvre pendant les dix dernières années. In cauda venenum : c’est dans la queue que se trouve le venin ! La queue d’un très long corps qui a pu, longtemps, ne pas passer pour aussi venimeux qu’il se révéla en fin de compte. Quel allongement est celui de ce corps ? La crise date-t-elle de 2002… ? 2000… 1999… 1993… 1963… avant ?… la colonisation ? Il est permis de s’interroger – et c’est ce que font actuellement tous ceux, nombreux, qui entendent contribuer à l’œuvre de vérité, justice et réconciliation décidée par le nouveau régime… avec tous les risques que comporte cette entreprise… 

En tout cas les évènements, à cause même de l’effroi qu’ils ont créé, ont entraîné deux sentiments :

  • celui de la prise de conscience, lente, longue, progressive des défaillances qu’il faut déjà qualifier de profondes, de la société ivoirienne ;
  • celui de l’importance des défis à relever pour la construction d’une société ivoirienne nouvelle, ne reprenant justement pas à son compte ces défaillances mais ambitionnant de faire les choses à neuf !

Ce qui m’est personnellement apparu ‘immédiatement effroyable’, ce furent les tout premiers jours, fin novembre et début décembre certains actes publics : d’un membre de la CEI interrompant la proclamation de résultats devant les caméras du monde entier ; puis du président du FPI envahissant le studio de la télévision du matin au soir pour persuader mensongèrement l’opinion publique de graves fraudes ici ou là ; et encore du président d’un conseil constitutionnel parjure du droit national et international dont il a la mission de rappeler au contraire qu’il est la loi de paix pour l’ensemble de la société ; et enfin la pitrerie d’un président sortant se faisant investir solennellement à la hâte devant ses seuls fidèles comme dépositaire et mandataire de l’Autorité sur tous les citoyens et les étrangers résidant dans la cité ! Oui c’est bien d’EFFROI qu’il s’agissait aussitôt pour moi… et d’impression d’une diablerie démoniaque active… La suite ne fut que le développement progressif, systématique, des effets de ce venin dont la poche venait de se déchirer au bout de la queue de je ne sais quel serpent, vipère ou scorpion… Cela devait durer en s’amplifiant de jour en jour, avec le ballet de tous les anges du diable et du bon dieu se succédant au chevet du malade aux rythmes des danses tout à tour tranquilles et sereines, fiévreuses et endiablées des médiateurs venant de loin, ou se réunissant à Addis Abeba, Abuja, Bamako… comme de l’un et l’autre gouvernements en lice et concurrents, parcourant l’Afrique de l’Ouest, du Centre, du Sud, l’Europe ou l’Amérique du Nord… Pour ne rien dire des ambiances qui devaient régner au Golf Hôtel d’une part, et au Palais présidentiel d’autre part… Pour ne rien dire surtout de tous les actes de violence et de barbarie se commettant et se multipliant dans certaines régions reculées du pays, et des quartiers d’Abidjan…

Effroyables furent aussi, à mon sens, au bout de la chaîne de ces évènements, parmi tous les gestes d’allégeance au nouveau Président, les renversements de veste de nombreux acteurs de l’ancien régime, par exemple l’aveu difficilement croyable de Paul N’Dré, le 20 avril, reconnaissant devant Alassane Ouatara qu’il avait enfin consenti à venir saluer depuis Accra : « Nous sommes allés trop loin, les Ivoiriens… Nous sommes tous responsables de ce qui est arrivé : le président actuel, le président parti, (Laurent) Gbagbo, les citoyens, les médias, tout le monde est responsable, voilà… »

Les journalistes remarquaient que le président de cette plus haute institution de la société, le Conseil Constitutionnel, avait tout de même le visage visiblement tendu, conscient d’avoir à recevoir bientôt et disposé à le faire le serment d’Alassane Ouattara après avoir imposé celui de Laurent Gbagbo…

Effroyable, mais parfaitement représentatif de l’état présent de sauvagerie de l’esprit public ivoirien au terme de six mois d’épreuve tragique : meurtres et assassinats… représailles… menaces… peur et terreur conduisant à se cacher, devenir clandestin dans son propre pays, s’exiler… Parcourant, à la suite des articles que je lis dans abidjan.net, les commentaires des uns et des autres, je demeure saisi d’effroi devant la radicalisation de leur expression… Le dialogue est difficile, l’ampleur de la tache est colossale en vérité ! Mardi de la semaine dernière, vous plaidiez, Monsieur l’Ambassadeur, devant les chefs d’entreprise français la restauration de la confiance entre la Nouvelle Côte d’Ivoire et ses partenaires économiques, mais vous aurez noté comme moi  la remarque d’un participant à la fin de cette réunion, selon qui le problème était moins de restaurer la confiance internationale entre la Côte d’Ivoire et ses partenaires que d’instaurer la confiance nationale, entre Ivoiriens… Et c’est sur ce point que je voudrais vous proposer encore quelques réflexions personnelles.

2) Relire, dans un second temps, ces ‘évènements’ – voulus, subis…- et leurs suites…

Je ne souhaite pas m’attarder sur toutes les données de la situation présente, qui évolue bien sûr jour après jour et dont chacun peut suivre les développements : enthousiasme de ceux-ci, ralliement des uns, résistance des autres, conspiration peut-être de ceux-là… La crise ne cesse pas de produire ses effets, en particulier avec le reclassement de toutes les forces organisées : forces politiques d’abord, au sein bien sûr de l’ex-majorité présidentielle (CNRD, FPI, formations auxiliaires…), mais aussi de la nouvelle (RHDP, PDCI, formations secondaires…) ; forces religieuses ensuite, aucune n’ayant été vierge dans les évènements qui ont eu lieu, et vous savez les souffrances morales qui en sont résulté pour nombre de fidèles catholiques, protestants, musulmans… dont les hiérarchies sont désunies… Mais je crois qu’il faut aussi savoir comptabiliser les effets positifs autant que les effets négatifs de ces reclassements à divers niveaux : 

au plan politique : autant il peut paraître évidemment choquant que le même président du Conseil constitutionnel organise la prestation de serment de Laurent Gbagbo puis celle, six mois plus tard, d’Alassane Ouattara, autant il est paradoxalement réjouissant que ces deux actes soient inscrits dans un même signe : celui de la continuité de l’Etat et non de sa brisure historique ! L’on peut même y discerner, de la part du nouveau Président, un acte majeur et de haute politique pour l’écriture de l’histoire de la Côte d’Ivoire, au lieu d’une action révolutionnaire interrompant la continuité de son cours ! L’Etat, dit-on, ne meurt pas – ce qu’en juriste positiviste, Paul N’Dré a bien voulu concéder dans l’intérêt supérieur de la Nation. Au cœur de toutes les difficultés actuellement vécues en ces temps de post-crise, il y a bien sûr aussi la consécration de la régularité d’un scrutin authentifié par une Commission électorale nationale et validé par la Communauté internationale (qui ne voit la contribution que, de ce point de vue, la Côte d’Ivoire a probablement apportée à la régularité des scrutins à venir sur le continent africain ?). Il y a aussi l’inauguration d’un vrai régime d’alternance démocratique, avec ses conséquences observables : formation d’une opposition se voulant reconnue et républicaine, revendiquant ses rôles de critique dans le respect de la légalité présente et candidate dans la compétition pour accéder à l’exercice du pouvoir à l’occasion de scrutins ultérieurs – donc abandonnant l’idée d’intégrer un gouvernement d’union nationale. Il y a enfin la reconnaissance par tous du besoin, désormais patent, de travailler à l‘authentique conciliation et cohésion de la ‘nation’, ce qui reste, cinquante ans après l’indépendance, la grande affaire de toutes les sociétés africaines, et il est évidemment significatif que les relations se tissent entre Gagnoa, Yamoussoukro, Korhogo et les autres chefs-lieux de régions ethniques… Si la politique est l’art et la science de la gestion de la violence publique par delà précisément l’affrontement de toutes les violences privées, il n’est pas impossible que la crise ivoirienne soit finalement une réussite : sans véritable guerre civile et avec des résultats quasiment tangibles de reconstruction économique mais, plus encore, de construction politique ! Pourtant ne nous faisons pas d’illusion ; l’Etat existe-t-il encore, déjà, en Côte d’Ivoire ?

C’est Mamadou Coulibaly qui disait il y a juste quelques jours qu’il avait tout simplement disparu…

L’Etat n’existe d’ailleurs qu’autant qu’il est pensé, au moins par ceux qui le représentent. Il faut espérer qu’il le soit au moins à nouveau… Mais le seul niveau ou plan politique peut-il suffire ?

au plan moral, éthique : on sait que l’un des objectifs majeurs du nouveau Président est de mettre sur pied une Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation. Au journaliste lui demandant ce qu’il en pensait, un vice-président du CNRD, non-membre du FPI, répondait ainsi lundi dernier : « L’idée est très bonne, elle permettrait sans doute aux Ivoiriens de vider leurs contentieux à cette occasion. Mais ce qui m’intrigue, c’est la précipitation avec laquelle cette commission a été créée, sur les cendres chaudes de la violence sanglante. Qu’est-ce qu’il y a d’urgent par rapport à la sécurité, aux pillages des domiciles, aux exactions diverses, à la liberté de circulation des hommes ? Avec qui dialoguer, la peur au ventre ? Dire la vérité dans quelle aire de liberté, sans être inquiété ? Comment se réconcilier sur les braises ardentes de la colère, de la rancœur et de l’esprit de vengeance ? A mon humble avis, la création de cette commission ressemble à l’expression imagée de la « mise de la charrue avant les bœufs ». C’est une institution très importante pour établir une paix durable dans notre pays. De nombreux considérants devraient faire l’objet d’une réflexion approfondie pour en cerner les contours avant sa création, à savoir, son mode de fonctionnement, sa composition avec des critères bien définis pour la désignation des hommes, le champ d’action ou le contenu de sa mission par rapport à l’action judiciaire. Elle doit bénéficier d’une dose de neutralité, gage de sa crédibilité. Telle que créée, je crains bien fort qu’elle ne contienne, déjà, les germes de son échec. En tout état de cause, avec l’amour qui m’habite pour mon pays, je souhaite, sincère ment, que la réalité triomphe de ma crainte et que cette commission nous apporte une paix durable. » La sortie de crise, au plan éthique, sera plus longue que la simple sortie de crise au plan politique car la politique, au sens d’ailleurs le plus sain du mot, n’est que le résultat d’un réflexe intéressé : il vaut mieux vivre ensemble malgré tout que nous entretuer tous ensemble. Mais la politique ne dit rien des sentiments plus profonds qui font la vie quotidienne des membres de la cité ainsi appelés à vivre ensemble, et la politique peut se révéler une ‘hypocrisie’, c’est-à-dire, selon le petit Robert, « un vice consistant à déguiser le véritable caractère, à feindre des opinions et des sentiments, aboutissant à la dissimulation, la duplicité, la fausseté, la fourberie ». L’hypocrisie est, certes, chose commune en politique, mais la politique ne gagne pas longtemps à s’en suffire : il faut faire la vérité sans fard pour édifier véritablement une cité commune où il fait bon vivre en citoyens. C’est pourtant la chose la plus difficile à établir présentement et publiquement en Côte d’Ivoire, et lorsque l’évêque Lezoutié dit : « Ce que j’ai écrit, l’a été parce que c’est Alassane Ouattara qui a gagné les élections. Je l’ai écrit non pas pour défendre un homme mais pour défendre la vérité. », il répond à ses prêtres qui l’accusent de complicité politicienne ! Il est sans doute urgent de tout faire pour promouvoir un minimum d’éthique dans la société ivoirienne, et il faut se réjouir qu’un projet de Charte éthique soit en cours d’établissement en premier lieu pour les membres du gouvernement – dont déjà le respect de la ponctualité ! La morale concerne les mœurs, la manière de se comporter en société, et beaucoup reste à faire pour fonder en vérité éthique les soubassements d’une société authentiquement politique (cf. absentéisme, racket, corruption…). La quête éthique de la ‘Vérité’ ne consiste pas seulement à en dénoncer le contraire, l’erreur, et à la punir en justice. Mais visant à établir la vérité de la parole, elle travaille savant tout à établir sa crédibilité et la confiance sociale !

au plan spirituel et culturel : le titre de votre allocution aux chefs d’entreprise, le 8 juin, Monsieur l’Ambassadeur, comportait des mots qui attirent mon attention : Comment restaurer la confiance ? Cela signifie déjà que la confiance a en réalité été au moins perdue un moment. Mais quelles en sont les raisons ? Il est certain que la confiance est une chose très fragile, et que s’il est possible de la gagner, lentement, progressivement, il est plus encore possible de la perdre très vite, et alors il devient très difficile de la reconquérir de la part des partenaires : chat échaudé craint l’eau froide ! La confiance ne se joue pas, comme au loto. Elle se fonde sur les qualités des interlocuteurs qui se font confiance, ou pas! Et de ce point de vue, la Côte d’Ivoire Nouvelle aura assurément beaucoup à faire pour instaurer entre tous ses membres ce climat de confiance si difficile à établir, à développer, mais si précieux pour le commerce des hommes entre eux. L’image de Côte d’Ivoire a souffert ces quinze dernières années de l’image de l’art de la boulangerie, je n’ai pas besoin de préciser plus… Mais ne souffre-t-elle pas, depuis plus longtemps encore, des appréciations de fourberie invétérée ayant eu cours dans les années antérieures et ayant instillé dans le corps social comme une culture de la fourberie ? La confiance est-elle d’ailleurs au rendez-vous ordinaire et banal des relations sociales lorsque les croyances et pratiques de sorcellerie ne sont pas les dernières à les réguler ? Je m’empresse de dire que la Côte d’Ivoire n’en a d’ailleurs assurément pas le monopole, en Afrique, bien sûr, mais partout dans le monde – qu’il s’agisse de ses formes traditionnelles comme dans mon Berry ou en Bretagne, ou de ses formes modernes observables jusques dans les cercles politiciens parisiens ! L’on touche là sans doute, au-delà des niveaux politiques assez superficiels, et éthiques, plus essentiels, au niveau proprement spirituel des forces, des énergies et des esprits qui œuvrent à leur manière dans l’humanité, dans les relations des hommes entre eux, dans les relations de chaque humain, de chaque Homme avec soi-même, et avec ses ‘dieux’, du bien, du mal, jouant quelque peu ensemble comme Dieu et Satan autour du pauvre Job de la bible… Comment restaurer la confiance? Comment crédibiliser la Parole ? Faire la vérité vous rendra libre : Toute la vérité ? Est-elle toujours bonne à dire ou même seulement à établir ? Faut-il savoir oublier bien des choses ? … d’un point de vue de l’intérêt général, du bien commun, par exemple ? Le maire de la commune de Koumassy le disait il y a quelques jours : « Aujourd’hui, nous sommes à une étape cruciale de notre vie et on a  véritablement besoin que les gens oublient ce qui s’est passé et se mettent ensemble pour reconstruire le pays…Nous sommes à l’heure de la réconciliation, de l’oubli et du pardon. » Mais fort heureusement le même veut inviter tout le monde à l’humilité nécessaire. Il faut se remettre en cause, reconnaître à quelque niveau que ce soit, sa responsabilité dans la grave crise que nous avons connue et demander pardon. » Un autre aspect de ce travail d’instaurer, restaure la confiance réside dans l’éducation de la mémoire : Il est nécessaire de connaître sans tabou tous les épisodes de l’histoire d’un pays, il est malsain de vouloir les passer sous silence, il est normal d’en débattre. …L’Histoire est ce qu’elle est, nous devons la connaître, l’assumer, la poursuivre en la dépassant, en nous gardant de la posture expiatoire comme de l’auto-encensement. Antidote au catéchisme du devoir de mémoire : l’Histoire. N’en rien occulter. Tout enseigner. Tout transmettre. En tirer des leçons pour l’avenir constamment réactualisées.

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J’ai voulu parler de l’expérience de l’effroi que j’ai ressenti depuis le 1er décembre particulièrement, et dont je garde vivante la mémoire : ce me semble être le début de la Sagesse pour construire une Nouvelle Côte d’Ivoire, instruite par l’épreuve, et se connaissant mieux sans doute qu’elle ne s’est jamais connue ! Il n’est pas vrai, je crois, qu’elle se reconstruira seulement en oubliant, en tournant la page… Elle recommencerait comme avant, comme jusqu’ici… A toute chose malheur est bon, en vérité ! C’est de la capacité de l’Homme à connaître et traverser l’épreuve que dépend son aptitude non seulement à survivre, mais à vivre et à dominer le monde qui lui est confié ! L’épreuve a été humiliante ? Tant mieux si elle est aussi devenue école d’humilité… le premier pas de la sagesse !

 La mise à niveau technique, on peut la faire, c’est sur le fond que c’est beaucoup plus difficile: com-ment former les hommes, comment être sûr de leur loyauté? Surtout dans un système très ethnicisé.

Nb. Eduquer au sentiment et à la conscience de la dignité de la personne humaine : mission du CERAP.

Père Denis Maugenest

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1 Comment

  1. Virgil Armitage26 mai 2020

    Simply a smiling visitant here to share the love (:, btw great style. « Treat the other man’s faith gently it is all he has to believe with. » by Athenus.

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