Les Défis Stratégiques Africains: Exploration des Racines de la Conflictualité en Afrique Centrale

CAMEROUN : « L’Unité Nationale » au Fondement de la Construction de l’État, Mécanismes du Fonctionnement, Épreuve des Faits

« L’Unité nationale », maitre-mot de la politique de M. Ahidjo qui présida aux destinées du Cameroun plus de deux décennies durant a constitué, en interaction avec d’autres éléments de pertinence, l’épine dorsale de la politique d’État. Le régime actuel -qui lui est à plus d’un titre, survivance- n’a dérogé, à hauteur de ses prétentions et capacités, aux pratiques sociales à l’épreuve desquelles cette politique a fait face et continue de faire face en tant que « système social ».

Dès la proclamation de l’indépendance le 1er janvier 1960, M. Ahidjo annonçait : « Depuis la lointaine époque où nos tribus libres, mais divisées, rivalisaient de vigueur guerrière, une nation s’est forgée, s’est dégagée de la marqueterie des races, des religions, des croyances et des coutumes. »

Bien avant cette date, lors du congrès de l’Union camerounaise (l’UC), son propre parti à N’Gaoundéré dans le septentrion, en juillet 1959, il avait prévenu certains chefs féodaux peuls musulmans de la nécessité de mettre un terme à leurs velléités séparatistes en leur indiquant que l’évolution se ferait avec eux ou contre eux. Certains d’entre eux seront d’ailleurs durement frappés des mesures restrictives de liberté en 1963, dans le droit fil du processus de consolidation de la forte centralisation du pouvoir qui allait déboucher sur l’instauration du parti unique en 1966.

C’était là, affirmation des prémices d’une politique qui allait s’efforcer de combattre l’ensemble des forces supposées centrifuges censées s’opposer à « L’Unité nationale », en un moment particulièrement difficile de l’existence du jeune Etat. Dans le cadre de la présente contribution, il va nous falloir rendre compte de la dynamique de cette politique « d’Unité nationale » avec les notions d’Etat, territoire et population, laquelle dynamique trouve toute sa justification dans « l’historicité propre » du Cameroun : des aléas d’une pluralité d’influences coloniales aux graves conséquences précisément de la lutte anticoloniale, qui marqueront durablement les esprits, et détermineront en grande partie, la configuration du régime de M. Ahidjo et de celui qui lui succédera. Nous considérerons le principe « d’Unité nationale » comme plate-forme structurante du processus de construction de l’Etat au Cameroun. Sur la base de cette présupposition, nous élaborerons une analyse des interactions des notions d’Etat, territoire et population. La politique « d’Unité nationale » a suscité par nécessité, pragmatisme et réalisme, les différents choix de politique nationale et internationale de l’Etat du Cameroun.

Nous limiterons notre examen de la situation du Cameroun à trois axes nous semblant nécessaires à investir, pour rendre compte de l’articulation dont nous voulons faire cas ici :

  • dans un premier temps, nous présenterons les contours de la politique « d’Unité nationale » à l’aune de son cadre socio-historique ;
  • ensuite, il nous sera permis de présenter les manifestations concrètes du vivre ensemble en des cas de figure concrets que nous développerons;
  • nous continuerons notre propos par une approche tout autant analytique, tendant à situer l’actualité de l’articulation dont nous traitons la substance, considération faite de certains enjeux : la grave crise de l’Etat au Cameroun, et les nécessités et difficultés d’une intégration sous-régionale passablement engagée.

Cette soumission du « système social » à « l’épreuve des pratiques sociales » est bien une nécessité procédant de l’ensemble des propriétés de tout « système social » comme l’envisage Balandier. Il cite par ailleurs l’obligation de satisfaire aux obligations du « système » et l’existence de « sous- systèmes » plus ou moins compatibles, qui font que tout « système » ne peut être qu’une réalisation approximative tendant à son plein accomplissement.

Nous insisterons en particulier, sur les « facteurs risques » de cet environnement, tributaire de causes suffisantes d’aggravation d’instabilité sociale et politique nationale et/ou sous régionale.

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Référence

« Cameroun : « L’Unité nationale » au fondement de la construction de l’Etat. Mécanismes de fonctionnement, épreuve des faits », Gnanguênon A., (dir.), « Les défis stratégiques africains : la gestion de la conflictualité en Afrique centrale », Etudes de l’IRSEM, n° 25, mai 2013, Pp.41-54. 

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